Dans les baux commerciaux, les parties peuvent prévoir que le preneur qui cède son bail, restera néanmoins garant des loyers dus par le nouveau preneur.
Cette clause est d’interprétation stricte et doit être rédigée avec soin.
Il en résulte que le preneur ayant cédé son bail pouvait être actionné par le bailleur en paiement de loyers dus par son successeur plusieurs années par la cession.
Pour réduire ce risque, la loi Pinel du 18.06.2014, entrée en vigueur le 20.06.2014, a réduit la durée d’application de cette garantie en instaurant un nouvel article L145-16-2 du Code de commerce aux termes duquel : « Si la cession du bail commercial s’accompagne d’une clause de garantie du cédant au bénéfice du bailleur, celui-ci ne peut l’invoquer que durant trois ans à compter de la cession dudit bail. »
La question se pose de savoir si cette nouvelle disposition est d’application rétroactive, c’est-à-dire si elle a vocation à s’appliquer lorsque la cession du bail est intervenue avant la loi du 18.06.2014.
Autrement dit est ce que pour ces cessions de baux signées avant le 20.06.2014, les bailleurs sont privés de la garantie du cédant alors que l’arriéré de loyers est né plus de 3 ans après la cession ?
Par un jugement du 16.10.2018 le Tribunal de Grande Instance de Toulouse a jugé que l’article L145-16-2 du Code de commerce n’était pas d’application rétroactive, quand bien même serait-il d’ordre public, dès lors qu’il ne répond pas à motif impérieux d’intérêt général.
Par conséquent pour les bailleurs dont le bail a été cédé avant le 20.06.2014, la garantie du preneur d’origine n’est pas limitée dans le temps et s’applique pendant toute la durée du bail.
Pour les cessions de baux intervenues après le 20.06.2014, la garantie est limitée aux loyers dus par le nouveau preneur durant les 3 ans suivant la cession.
En outre le nouvel article L145-16-1 impose au bailleur d’informer le cédant de tout défaut de paiement du cessionnaire dans le délai d’un mois à compter de la date d’exigibilité du loyer impayé.
Au-delà de la question d’application dans le temps de l’article L145-16-2 du Code de commerce, la garantie de loyers est une clause essentielle pour le bailleur – à condition qu’elle soit bien rédigée.
Elle a un intérêt certain en cas de procédure de sauvegarde judiciaire du nouveau preneur à bail. Elle permet en effet de demander au preneur d’origine les arriérés de loyers dus par son successeur, sans avoir à subir des délais de règlement de 10 ans en cas de redressement judiciaire ou une perte de loyers en cas de liquidation judiciaire.
Pour les bailleurs des résidences de tourisme ou para-hôtelières, il peut donc être judicieux de négocier dans le cadre du renouvellement du bail d’un avenant au bail, une clause de garantie de loyers.
Cécile PION
SCP GOBERT ET ASSOCIES