Dans une résidence de tourisme (ou résidence étudiante, résidence seniors, Ehpad, …), tout propriétaire bailleur redoute le jour où l’exploitant la résidence refuse de payer les loyers (et les charges locatives). Avec l’épidémie de COVID-19, de nombreux exploitants ont décidé de suspendre le paiement des loyers.
(voir nos précédents articles :
Malgré la pandémie de CORONAVIRUS, aucun texte de loi n’autorise les gestionnaires de résidences de tourisme à suspendre le paiement des loyers. En effet, l’ordonnance du 25 mars 2020 ne donne pas le droit au locataire de ne pas payer les loyers, mais seulement de ne pas être condamné à des pénalités en cas de retard de paiement. Et il faut encore que le gestionnaire soit susceptible de bénéficier du fonds de solidarité.
Le fonds de solidarité pour les exploitants de résidences de tourisme ?
(voir notre précédent article : Résidences de tourisme : les exploitants peuvent-ils bénéficier du fonds de solidarité ?)
- Non paiement de loyer : comment récupérer les arriérés de loyers ?
Quand le gestionnaire de la résidence de tourisme ne paye plus les loyers, le propriétaire se retrouve en difficulté car il ne peut parfois plus rembourser ses échéances de prêt immobilier.
Cette situation ne peut pas durer, il faut agir vite.
Pour récupérer ses loyers impayés, le propriétaire peut agir en 5 étapes :
- Les propriétaires de la résidence de tourisme se fédèrent en association ou en collectif et désignent un président pour les représenter et parler d’une seule voix (voir notre précédent article : Résidences gérées et suspension des loyers : comment contacter les autres copropriétaires pour se fédérer en association ?),
- Le président de l’association ou du collectif, avec l’accord des propriétaires membres, missionne un avocat pour recouvrer leurs loyers et charges échus et impayés,
- L’avocat adresse au gestionnaire une mise en demeure préalable par courrier recommandé avec accusé de réception pour obtenir le paiement des loyers et charges échus et impayés (ex : échéance du 31 mars 2020 pour les loyers et charges dus au titre du 1er trimestre 2020),
- Si, après mise en demeure d’avocat, le gestionnaire ne paye toujours pas les loyers et charges, l’avocat fait délivrer au gestionnaire un commandement de payer par huissier de justice,
- 1 mois après le commandement de payer, si le gestionnaire refuse toujours de payer les loyers et charges dus, l’avocat saisit le juge des référés pour demander la résiliation du bail commercial et la condamnation du locataire à payer sa dette.
1) La mise en demeure d’avocat
Confronté à une situation d’impayé de loyers (et de charges), il est toujours judicieux d’essayer de trouver un accord amiable avec le gestionnaire de la résidence de tourisme.
Une lettre de mise en demeure d’avocat peut permettre que le gestionnaire accepter de reprendre le paiement des arriérés de loyers et de charges, ou au moins s’assoit à la table des négociations.
Si en revanche aucun accord ne peut être trouvé, un commandement de payer sera nécessaire.
2) Le commandement de payer les loyers impayés visant la clause résolutoire
Le contrat de bail commercial comprend très souvent une clause résolutoire, qui permet en théorie de résilier le bail au premier impayé. En pratique, cette clause n’a pas autant d’effet, mais elle permet de demander la résiliation du bail commercial au juge des référés (et non au juge du fond où la procédure est plus longue).
L’avocat de l’association ou du collectif de propriétaires rédige un décompte locatif de la dette en commençant le tableau par la date à laquelle le solde locatif était à zéro. En clair, le décompte commence juste avant le premier loyer impayé. L’avocat joindra également le bail commercial et notamment la page contenant la clause résolutoire pour impayé.
Le commandement de payer est délivré par un huissier de justice au gestionnaire de la résidence de tourisme.
L’avis de passage de l’huissier suffit pour faire partir le délai d’un mois après la délivrance du commandement.
Cette étape permet souvent d’obtenir le paiement des sommes dues.
3) L’action en justice en paiement des loyers impayés
En cas d’impayé après un délai d’un mois après le commandement de payer, l’avocat de l’association ou du collectif de propriétaires saisit le juge des référés du tribunal judiciaire du lieu de la résidence pour demander la condamnation de l’exploitant au paiement des loyers impayés.
La décision rendue par le juge sera une ordonnance de référé qui permettra de mandater un huissier de justice pour saisir les comptes bancaires du locataire.
L’avocat peut, en plus de demander le paiement des loyers impayés, demander la résiliation du bail commercial et l’expulsion du gestionnaire, pour le forcer à régler ses loyers impayés.
- Comment obtenir une résiliation du bail pour loyers impayés ?
Ce qui intéresse ici le propriétaire, au-delà du simple paiement des loyers qui lui sont dus, c’est la résiliation du bail et l’expulsion du locataire fautif.
La stratégie à adopter dépend du profil du gestionnaire.
Si le locataire est exceptionnellement en retard dans le paiement des loyers mais qu’il ne répond pas à vos mails ou courriers, une lettre de mise en demeure d’avocat, voire un commandement de payer par huissier, peut souvent résoudre le problème.
Le propriétaire doit agir vite car en cas de défaut de remboursement de son prêt immobilier, la banque pourrait leur opposer la « déchéance du terme », c’est-à-dire exiger le remboursement total du capital et des intérêts après un seul mois d’impayé. Après c’est l’escalade car la banque peut engager une procédure de saisie-immobilière de votre bien immobilier (vente forcée du bien aux enchères), sauf si le propriétaire parvient à vendre son bien et à désintéresser la banque.
C’est pourquoi, en cas de mise en demeure d’avocat infructueuse, il faut immédiatement délivrer à l’exploitant un commandement de payer visant la clause résolutoire. Un mois après la délivrance, l’avocat saisira le juge des référés pour obtenir la condamnation du locataire. La condamnation du locataire par un juge permettra de saisir les comptes bancaires du locataire. L’exploitant de la résidence risque d’être condamné à quitter les lieux. Si le locataire ne quitte pas les lieux, il risque de faire l’objet d’une procédure d’expulsion. Cette menace motive la plupart des gestionnaires à régler leurs dettes locatives aux propriétaires bailleurs de la résidence de tourisme.
- Vérifiez la solvabilité de votre gestionnaire et exigez qu’il vous communique le compte d’exploitation de votre résidence
Sur le site du registre du commerce et des sociétés : infogreffe.fr, vous pouvez commander en ligne un Kbis de la société et un historique de ses modifications. Vous pourrez ainsi vérifier le nom de la société, qui n’est pas toujours le même que celui de la marque ou de l’enseigne figurant sur l’entête des courriers du locataire par exemple.
Vous pourrez commander les documents officiels relatifs à l’absence de procédure de faillite en cours (procédure collective : sauvegarde judiciaire, redressement judiciaire ou liquidation judiciaire).
Une fois par an, le gestionnaire est tenu de communiquer à l’ensemble des propriétaires un bilan de l’année écoulée, précisant les taux de remplissage obtenus, les évènements significatifs de l’année ainsi que le montant et l’évolution des principaux postes de dépenses et de recettes de la résidence.
De plus, le compte d’exploitation d’une résidence de tourisme doit être communiqué aux propriétaires qui en font la demande. Il doit comporter un détail des charges variables (commissions, linge, ménages, énergie,…) et des charges fixes (frais de personnel, maintenance, location, taxes,…) de la résidence.
(voir notre précédent article : Les gestionnaires de résidences de tourisme condamnés à devoir être transparents)
Ces informations sont capitales pour connaître la situation économique de votre résidence et donc de votre gestionnaire. En fonction, la stratégie à adopter pourra être différente.
Certains gestionnaires n’hésitaient déjà pas avant la pandémie de COVID-19 à cesser le paiement des loyers alors que leur situation économique était loin d’être mauvaise !
(voir nos précédents articles :
– Résidences de tourisme : bons résultats économiques de LAGRANGE mais non paiement des loyers
– LES ECHOS : interview de Me Gobert sur les risques de l’investissement en résidences avec services)