- Qu’est-ce qu’une surtension électrique ?
Une surtension électrique correspond à la situation où la tension apportée est supérieure à la tension maximale prévue. En effet, les conditions normales de fonctionnement des appareils électriques sont celles prévues par la norme NF EN 60335-1 soit une plage située entre 207 et 244 volts, de sorte qu’une surtension électrique sera supérieure à 244 volts. Cette surtension peut causer des dommages à vos appareils électroniques tels qu’à un chauffe-eau, four, téléphone, lampadaire, sonnette, une télévision, à un portail électrique…
- A qui s’adresser pour obtenir la réparation de ce type de dommages électriques ?
Il est conseiller de faire une déclaration à votre assurance « habitation » qui comporte peut-être une garantie « risques électriques ». Optionnelle, elle couvre l’ensemble des appareils électriques et protège des dégâts causés par une baisse ou hausse de tension. C’est aussi le cas de la garantie « perte de denrées en congélateur » qui permet d’obtenir des indemnités dans le cas de pertes alimentaires, due à une surtension électrique. L’inconvénient de s’adresser à votre assureur est que celui-ci peut vous opposer des non-garanties contractuelles ou des limitations dans l’indemnisation de vos préjudices résultant de dispositions contractuelles (franchises, plafonds de garantie, exclusion ou limitation de garantie, coefficients de vétusté).
Le responsable de cette surtension ne peut toutefois pas opposer ce genre de limitation d’indemnisation. En effet, en application de l’article L. 322-12 du Code de l’énergie et de l’article L 221-1 du code de la consommation, la responsabilité du distributeur d’énergie peut être recherchée dès lors qu’il a pour obligation légale d’exploiter le réseau de façon à assurer à tous les clients « une desserte en électricité d’une qualité régulière, définie et compatible avec les utilisations usuelles de l’énergie électrique ».
- Sur quel fondement juridique peut-on rechercher la responsabilité du distributeur d’électricité ?
Dans la mesure où la cause des dommages invoqués est une surtension sur le réseau de distribution d’électricité, c’est-à-dire un défaut de sécurité de l’électricité, la responsabilité du distributeur peut être recherchée sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux (CA Douai, 8/11/2007, n° 06/07124, CA Aix-en-Provence, 20/01/2012, n° 09/20204, CA Caen, 23/10/2012, n° 09/02445 ; CA Grenoble, 19/02/2013, n° 10/01411 ; CA de Colmar, 2ème ch. civ., sect. A, 3/05/2019 – n° 17/03868). En effet, l’électricité est considérée comme un produit et « est producteur, lorsqu’il agit à titre professionnel, le fabricant d’un produit fini, le producteur d’une matière première, le fabricant d’une partie composante ». La responsabilité du fait des produits défectueux, présente l’avantage d’être un régime de responsabilité sans faute à prouver.
- Quelles preuves devez-vous apporter pour obtenir une indemnisation ?
Il s’agit rapporter la preuve d’une desserte en électricité à l’origine du dommage supérieure à 244 volts. Cette preuve pourra se faire par le biais d’une expertise ordonnée par la justice ou organisée par votre assureur habitation ou protection juridique. Ainsi, il sera constaté que le dommage subi ne peut provenir que d’une surtension. Il est donc fortement conseillé de conserver le matériel électrique endommagé. La preuve peut aussi consister en des témoignages écrits de vos voisins ayant également subi une surtension au même moment sur leur installation. Il faut prouver enfin le dommage causé aux installations et il vous appartient de rapporter la preuve de votre dommage, à savoir le dysfonctionnement d’un appareil de votre installation intérieure. Ici encore, une expertise judiciaire ou amiable par le biais des assureurs, sera particulièrement utile. Ne pas jeter les appareils défectueux est aussi nécessaire pour pouvoir constater l’ampleur des dommages et un professionnel peut attester que le matériel n’est pas réparable. Des personnes de votre entourage peuvent aussi témoigner ce que le matériel électrique fonctionnait parfaitement avant la date de surtension. Il sera également nécessaire de retrouver les factures d’achat du matériel. Pour les dégâts survenus à vos produits alimentaires, conservez les tickets de caisse ou de carte bancaire prouvant que le congélateur avait récemment été réapprovisionné. En cas de dommages corporel dus à l’arrêt d’un respirateur ou à une chute par exemple liée à la coupure électrique, n’oubliez pas de joindre un certificat médical.
- Dans quels cas le distributeur d’énergie peut-il éviter d’avoir à vous indemniser ?
Le régime de responsabilité sans faute à prouver du fait des produits défectueux, est assorti d’une prescription de 3 ans, de sorte qu’il ne sera plus possible d’agir en justice 3 ans après la survenance de la surtension électrique. Le distributeur d’énergie peut également prouver qu’il n’y a aucun lien entre le problème de distribution d’énergie et le dommage causé à vos appareils. Ensuite, si votre installation électrique intérieure ne respecte pas les normes applicables, il peut être retenu une part de responsabilité à votre encontre. Le distributeur d’énergie peut aussi prouver l’existence d’un cas de force majeure empêchant l’exécution de la desserte d’énergie, tel que prévu à l’article 1218 du code civil. Un événement de force majeure désigne tout événement irrésistible, imprévisible et extérieur. Il peut donc s’agit de phénomènes atmosphériques irrésistibles par leur cause et leur ampleur et auxquels les réseaux électriques, et notamment aériens, sont particulièrement vulnérables (ex. : givre, neige, tempête…). Enfin, les faits du tiers peuvent être exonératoires de responsabilité : c’est le cas par exemple, des dommages causés par des faits accidentels et non maîtrisables, imputables à des tiers, tels qu’un incendie ou causés par des faits volontaires ou par un sabotage.
- Quelle réparation pouvez-vous obtenir du distributeur d’énergie ?
Si la responsabilité du distributeur est constatée ainsi que la réalité de vos dommages électrique, l’indemnisation ne doit ni être inférieure à la valeur du préjudice, ni le dépasser (Cass. 3ème civ., 8/07/2009, n° 08-10869). Vous avez droit selon les hypothèses, à une indemnisation de la perte subie du fait de l’atteinte portée au bien, et du gain manqué lié à cette destruction. La réparation se fera à hauteur du dommage causé, c’est-à-dire à hauteur du coût nécessaire pour le remplacement ou la réparation des appareils endommagés. La victime a donc droit à un remboursement des frais de réparation ou de remplacement de la chose, sans que ne puisse s’appliquer de jurisprudence constante, un coefficient de vétusté (Cass. crim., 24/02/2009, n° 08-83956 – Cass. 3ème civ., 19/02/2014, n° 13-12171). La Cour d’appel Aix-en-Provence, par un arrêt du 18 décembre 2009 a ainsi énoncé « que le préjudice sera réparé selon sa valeur de remplacement, sans abattement pour vétusté, la victime devant être replacée dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable ne s’était pas produit ». Ainsi dans l’hypothèse d’un bien déjà usagé, le responsable est tenu sur la base de sa valeur de remplacement, soit la somme nécessaire pour acheter un bien équivalent, et non sur celle de la valeur vénale. Quel qu’ait été l’état du bien avant l’accident, les dommages et intérêts sont donc fixés presque toujours sur la base d’une remise en état au coût du neuf (Cass. 3ème civ., 12/01/2010, n° 08-19224). Le fournisseur d’énergie peut également être condamné à tous les frais accessoires liés à la perte de votre matériel. Ainsi en est-il par exemple du préjudice causé par la perte de l’usage du bien, pendant la durée de son immobilisation, de l’éventuelle dépréciation de la valeur du bien qui subsisterait après sa réparation, ou de tout autre frais annexe. En revanche, il parait difficile d’obtenir un préjudice moral lié à une dégradation par surtension électrique.