ÉCLAIRAGE — De nombreux investisseurs se sont laissés convaincre par leurs banques ou leurs conseillers en gestion de patrimoine que l’acquisition de chambres médicalisées en EHPAD était un placement sûr. Défaut de conseil ? (publication dans la Revue de l’UNPI, Octobre 2022 I N° 566)
Les difficultés rencontrées par les bailleurs
Selon la grande enquête lancée par l’UNPI et le CODIRSE, pour près de la moitié des bailleurs en EHPAD, c’est la douche froide (et plus de 70% sont inquiets ou très inquiets par rapport à leur investissement) :
À la fin du premier bail commercial, il est fréquent que l’exploitant veuille faire signer un nouveau bail dans des conditions moins favorables pour les bailleurs : baisse du loyer, mise à leur charge de travaux de rénovation, de mise aux normes (ex : le décret tertiaire (1))…
Pire, l’exploitant décide parfois de transférer les lits dans un autre EHPAD plus grand et plus neuf (ex : DOMUS VI). En l’absence de nouveau gestionnaire, les copropriétaires se retrouvent sans bail commercial et avec des chambres impossibles à louer, car destinées à abriter des personnes en perte d’autonomie.
Des difficultés aggravées suite au récent scandale de la maltraitance dans les EHPAD
Depuis l’enquête de « Cash Investigation », diffusée sur France 2, de graves dysfonctionnements des groupes d’EHPAD KORIAN, ORPEA et DOMUS VI ont été pointés du doigt. Par exemple, ORPEA a reçu une mise en demeure du 29 juillet 2022 de restitution de financements indûment perçus à hauteur de 55,8 millions euros, suite au rapport de la mission commune IGAS-IGF (2).
La multiplication des contrôles administratifs risque d’engendrer la hausse des dépenses d’encadrement comme de restaurant et, en conséquence, une baisse des loyers versés aux propriétaires car le taux d’effort pour l’exploitant va augmenter (loyers/marge d’exploitation avant loyer).
Ebranlé par les révélations du livre-enquête Les Fossoyeurs sur la gestion de ses établissements, ORPEA a pris une série d’engagements afin d’améliorer la relation avec les familles de résidents ainsi que les conditions de travail de ses employés. Il a aussi largement remanié ses instances dirigeantes. (3)
Il existe également un risque lié à la perte de la valeur vénale du bien immobilier : « Une décote de 5 à 10 % s’applique désormais à leur revente. » (4)
« Banques et conseillers en gestion de patrimoine rechignent désormais à orienter leurs clients vers ce type de produits. » (4) L’or gris n’a plus la côte.
Comment protéger l’investissement des bailleurs ?
Le CODIRSE-UNPI invite les bailleurs à se regrouper avec les copropriétaires de leur résidence d’EHPAD afin de mieux défendre leurs intérêts communs.
Spécialisé dans la défense des propriétaires privés depuis des années, le CODIRSE-UNPI peut vous aider à vous regrouper et vous organiser. Nous avons l’expérience des résidences gérées.
Sachez qu’aucun exploitant d’EHPAD ne peut imposer de baisse de loyers aux bailleurs. En cas de désaccord, le preneur devra saisir le juge des loyers commerciaux. Et avant de rendre sa décision, le juge désignera généralement un expert judiciaire pour déterminer la valeur locative de la résidence.
La Cour de cassation a déjà sanctionné un preneur (la société ORPEA ici) pour manquement à son devoir
de loyauté contractuelle à l’égard des bailleurs (5).
Une action contre le vendeur du placement en EHPAD pour défaut de conseil, pourrait aussi être envisagée. En effet, avant d’investir et de donner son consentement libre et éclairé, encore faut il avoir connaissance des aléas possibles.
La Cour de cassation a déjà sanctionné un conseiller en patrimoine (la société LAGRANGE PATRIMOINE CONSEIL ici) pour manquement à son obligation d’information et de conseil à l’égard des investisseurs : « la sécurité de l’opération avait été déterminante de leur consentement et, s’ils avaient été informés du risque de non-perception des loyers en cas de déconfiture du preneur à bail, ils auraient refusé de souscrire à l’investissement, ce dont il résultait une absence d’aléa » (6). La responsabilité du notaire a parfois pu être retenue. Censé connaître l’état du marché local, il doit en tirer les conséquences et éventuellement déconseiller une opération immobilière de défiscalisation vouée à l’échec (7).
Le cabinet Gobert & Associés, qui défend des milliers d’investisseurs depuis quinze ans, a l’habitude de ces procédures, il pourra vous conseiller et vous représenter au mieux.
1) Sur ce point voir p. 34. : « Décret tertiaire – Les obligations de réduction de consommation d’énergie finale. »
2) « Orpea : restitution de sommes exigées par la CNSA », abcbourse.com.
4) « EHPAD, miser sur les placements ‘seniors’ est de plus en plus risqué », capital.fr.
5) Cour de cassation, Chambre civile 3, 5 octobre 2017, 16-17.533.
6) Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 2 février 2022, 21-10.205.
7) Cass. com., 20 sept. 2017, n° 15-14176 : JurisData n°2017-020745.