Abandon de loyer en novembre et décembre 2020: Cet article s’intéresse aux conditions d’obtention du crédit d’ impôt de 50% annoncé par Bruno Le Maire sur BFMTV, les Echos et en conférence de presse.
Le 20 novembre 2020
Le cabinet GOBERT & Associés (Avocats à Marseille) vous alertait dans un article « APPEL A L’ABANDON DE LOYER : CRÉDIT D’IMPÔT, UNE VRAIE CONTREPARTIE ? » publié le 13 novembre sur les risques que prenaient les propriétaires à consentir des abandons de loyers.
La publication, ce jeudi 19 novembre, du texte de la version provisoire de dispositif, loin de lever nos craintes, invite à la prudence et une analyse au cas par cas de la situation de chaque propriétaire-bailleur.
Le projet de dispositif du crédit d’impôt en cas d’abandon de loyers (ci-après « CIAL ») annoncé par M. Le Maire est adopté par l’Assemblée Nationale en 1ère lecture[i].
Pour recevoir une information complémentaire sur le crédit d’impôt « abandon de loyer » veuillez remplir le formulaire de contact disponible sur notre site : CONTACT.
1) Comment fonctionne un crédit d’impôt ?
Un « CI » (crédit d’impôt) vient en déduction de l’imposition due par son bénéficiaire. Il n’est pas déduit de ses revenus ou bénéfices.
Attention : en tant que crédit d’impôt, ce dispositif est soumis à plafonnement selon certaines conditions.
2) Qui peut obtenir le crédit d’impôt « abandon de loyer » ?
Le crédit d’impôt « abandon de loyer » s’adresse aux bailleurs de locaux professionnels affectés par l’épidémie de Covid-19.
Son bénéfice est toutefois réservé à certaines situations particulièrement difficiles.
3) Quel est le taux du crédit d’impôt « abandon de loyer » ?
Le taux du crédit d’impôt « abandon de loyer » est de 50%([ii]) de la somme totale des abandons ou renonciations de loyers éligibles([iii]) consenties entre octobre et décembre 2020([iv]).
Concrètement :
- Un abandon de 100 euros à un locataire ayant un effectif inférieur à 250 salariés ouvrira potentiellement droit à un CIAL de 50 euros ;
- Un abandon de 100 euros à un locataire ayant un effectif compris entre 250 et 4999 salariés ouvrira potentiellement droit à un CIAL de 33,33 euros ;
- Un abandon de 100 à un locataire ayant un effectif supérieur ou égal à 5000 salariés n’ouvrira pas droit au CIAL([v]).
Attention : l’éligibilité à une mesure d’incitation fiscale ne garantit pas dans quelles proportions vous pouvez en profiter. Chaque situation appelle une réponse individualisée.
4) Conditions d’obtention du crédit d’impôt « abandon de loyer »
Les conditions d’éligibilité au dispositif ainsi que ses modalités de mise en œuvre sont multiples. Elles concernent tant le bailleur que le preneur.
a) Condition relative à la situation du bailleur :
Le dispositif prévoit que le CIAL est ouvert aux :
« bailleurs, personnes physiques ou morales de droit privé »([vi])
Tous les bailleurs (grandes foncières, petits propriétaires…) sont en principe éligibles au crédit d’impôt « abandon de loyer ».
Pour bénéficier du Crédit d’impôt « abandon de loyer », toutes les autres conditions doivent être remplies. Ces dernières portent sur la situation du locataire. Ne procédez pas à un abandon ou une renonciation de loyers précipités. Pensez à vérifier votre éligibilité au dispositif.
b) Conditions relatives à la situation du preneur :
1°) Première condition d’obtention du crédit d’impôt:
Seuls sont concernés par le dispositif, les bailleurs qui consentent à l’abandon du loyer à des entreprises qui:
- Soit prennent à bail des locaux faisant l’objet d’une interdiction d’accueil du public ;
- Soit exercent leur activité principale dans certains secteurs([vii]).
Au cas particulier des résidences de tourisme, se pose la question de savoir comment le maintien, dans certaines résidences, de résidents à l’année sera appréhendé par l’administration au moment des demandes de crédit d’impôt ? Une résidence qui accueille toujours certains résidents est-elle « interdite au public » ?
A côté des crédits d’impôt accordés aux bailleurs locaux interdits d’accès, sont également éligibles les abandons consentis à des locataires dont l’activité principale est, notamment :
« Hôtel et hébergement similaire;
Hébergement touristique et autre hébergement de courte durée(…)
Services de restauration collective sous contrat, de cantines et restaurants d’entreprise(…)
Accueils collectifs de mineurs en hébergement touristique(…) »
Les doutes évoqués dans notre premier article sont donc levés sur ce point.
Des questions demeurent en suspens. C’est notamment le cas de celle du sort réservé aux abandons consentis par des propriétaires de lots affectés, par les gestionnaires de résidence, à la résidence principale de certains de leurs clients.
Il reste que, pour bénéficier du crédit d’impôt « abandon de loyer », trois autres conditions doivent être remplies et certaines formalités accomplies :
2°) Condition d’obtention du crédit d’impôt tenant à l’effectif du preneur
Le dispositif introduit dans le PLF2021 prévoit que l’abandon doit être consenti à une entreprise qui emploie moins de 5.000 salariés.
Étant précisé qu’un groupe d’entreprises liées (lien capitalistiques) constituera un seul « bénéficiaire de l’abandon » et c’est au niveau de cette entité que sera appréciée la limite des 5.000 salariés.
3°) Condition tenant à l’absence de difficulté au sens du droit européen
« Ne pas être en difficulté au 31 décembre 2019, au sens du règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité ; »
Attention : les règles issues du droit de l’UE diffèrent de celles du droit national.
4°) Condition relative à l’absence d’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire
« Ne pas être en liquidation judiciaire au 1er mars 2020. »
Les grandes foncières bailleresse sont à même d’enquêter sur la situation des entreprises auxquelles elles donnent en location des locaux éligibles au Crédit d’impôt « abandon de loyer ».
Tel n’est souvent pas le cas des propriétaires-bailleurs en résidence de tourisme qui rencontreront des difficultés pour analyser leur éligibilité au dispositif.
5) Quelles sont les autres modalités d’application du crédit d’impôt « abandon de loyer » ?
Au-delà des conditions d’éligibilité des abandons et renonciations de loyers, le dispositif prévoit des modalités particulières d’application du crédit d’impôt « abandon de loyer ».
De ces modalités peut résulter, toutes conditions d’éligibilité étant par ailleurs remplies, une perte totale du bénéfice du crédit d’impôt.
La complexité de ce dispositif appelle donc une analyse minutieuse de chaque situation.
Le dispositif est soumis au droit de l’Union Européenne :
« 2. Le montant total des abandons ou renonciations de loyers donnant lieu à crédit d’impôt dont bénéficie chaque entreprise locataire ne peut excéder le plafond de 800 000 € défini au 3.1 de la communication de la Commission européenne du 19 mars 2020 relative à l’encadrement temporaire des mesures d’aides d’État visant à soutenir l’économie dans le contexte actuel de la flambée de covid-19. »
Parmi les dispositions de cette communication, on peut notamment relever que la Commission Européenne conditionne la validité des dispositifs pris par les États membres de l’UE à ce que :
« L’aide soit (est) octroyée au plus tard le 31 décembre 2020([viii]) »
Cette disposition vise à limiter l’impact sur le budget de la mesure. Elle est particulièrement problématique dans le cas des résidences de tourismes : Les gestionnaires-preneurs sont susceptibles de se voir consentir de volumineux abandons de loyers.
6) Dans quel délai consentir à l’ abandon de loyer ? Quand demander son crédit d’impôt ?
Comme nous l’indiquions déjà dans notre précédent article, il existe une dissymétrie entre l’abandon sollicité au cours des mois d’octobre à décembre 2020 (et donc définitif) et le délai d’examen par l’administration fiscale des demandes de crédit d’impôt.
7) Comment demander son crédit d’impôt en cas d’abandon de loyer ?
Selon le projet de dispositif, le bénéfice du crédit d’impôt abandon de loyer est réservé aux contribuables qui en font correctement la demande :
« IV. – Pour bénéficier du crédit d’impôt, les bailleurs déposent une déclaration conforme à un modèle établi par l’administration dans les mêmes délais que la déclaration annuelle de revenu ou de résultat souscrite en application des articles 53 A, 170 et 223 du code général des impôts.»
Le cabinet GOBERT & ASSOCIES, mobilisé pour la défense des propriétaire-bailleurs en résidences gérées (tourisme, étudiantes, séjours, affaires…), propose à chaque client un accompagnement personnalisé dans l’accomplissement de ces démarches.
Nous ne manquerons pas de compléter cette première analyse par une étude plus poussée de ce projet de dispositif.
Pour recevoir une information complémentaire sur le crédit d’impôt « abandon de loyer » veuillez remplir le formulaire de contact disponible sur notre site : CONTACT.
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Mise en garde :
Ce document analyse le dispositif annoncé par Monsieur le Ministre de l’Economie,
des Finances et de la Relance, Bruno Le Maire, et adopté en 1ère lecture
à l’Assemblée Nationale le 19 novembre 2020.
Ce texte, actuellement en 1ère lecture au Sénat, est sujet à modification. Seule la loi définitivement votée (impérativement avant le 31 décembre 2020) nous livrera le dispositif final.
En outre, les PLFR (projets de loi de finances rectificatives) 2021 pourront moduler certaines dispositions du crédit d’impôt. En effet, les engagements de l’État (coût global de la mesure) peuvent faire l’objet de plafonnements.
Ce document n’a donc ni l’objectif, ni la portée, d’un conseil juridique ou fiscal.
Le contenu de ce document se borne à relever les mécanismes fiscaux mis en œuvre, au cas particulier des propriétaires-bailleurs de lots en résidence de tourisme.
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[i] Figure à l’article 43 sexdecies du projet de loi de finances pour 2021(ci-après « PLF2021 »)
[ii] Art. 43 sexdecies II-1
[iii] Attention : les abandons consentis aux entreprises de plus de 250 salariés sont retenus dans la limite des 2/3 de leur montant.
[iv] Le texte fait en réalité référence « au titre de la période d’application des restrictions de déplacement prévues à l’article 4 du décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 »… article 4 ne prévoyant aucun délai d’application desdites mesures.
[v] En application de l’article 43 sexdecies I-1 2° du PLF2021.
[vi] Art. 43 sexdecies I-1
[vii] Secteurs mentionnés à l’annexe 1 du décret n°2020-371 du 30 mars 2020.
[viii] Cependant : « Si l’aide est octroyée sous forme d’avantages fiscaux, ce délai ne s’applique pas, et l’aide est considérée comme étant octroyée à la date à laquelle la déclaration fiscale relative à l’exercice 2020 doit être introduite. »